Imaginez-vous si soudain le gouvernenent canadien décidait qu’il fallait changer la date du Jour du Souvenir du 11 novembre au 28 juillet parce que cette date-ci est reconnue pour le début de la Première Guerre mondiale quand l’Autriche-Hongrie sous l’impulsion de l’Allemagne déclara la guerre à la Serbie. Ne serait-ce pas plus juste de retenir le 11 Novembre puisque cela marque la fin officiel de tant de souffrances humaines d’innocentes victimes.

Pourtant c’est exactement cela que Patrimoine Canadien en collusion avec plusieurs intervenants de notre élite acadienne fait à chaque 28 juillet depuis la Proclamation royale « canadienne » de 2003 (au lieu d’avoir appuyé une démarche initiale pour que se réalise, au moins, une Proclamation royale qui ne fut qu’un grossier tour de passe-passe pour épargner la Couronne anglaise, pourtant seule coupable du nettoyage ethnique des Acadiens. Pourtant le gouvernement de Jean Chrétien aurait pu appuyer une démarche plus raliste  pour que se réalise ultimement une Proclamation royale « britannique » en Grande-Bretagne. Des excuses de la reine de la Grande-Bretagne (et non du Canada) et chef  de l’Église anglicane, auraient pu proclamer la fin de l’exil des Acadiens en abrogeant enfin l’ordre de la Déportation qui d’ailleurs est toujours en vigueur.

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Ce que Patrimoine canadien propage à chaque 28 juillet c’est que le 28 juillet est la date que la Couronne britannique a « pris la décision » de déporter les Acadiens, un peu comme si la date pour le Jour du Souvenir du 11 novembre devait être modifiée pour concorder avec la date qu’a commencé la Première Guerre mondiale. L’allégation que la décision pour déporter les Acadiens fut le 28 juillet constitue une ruse de la part de Patrimoine canadien pour cibler Lawrence et son Conseil de la Nouvelle-Écosse, à Halifax, en tant que premiers bourreaux responsables de la déportation des Acadiens. Pourtant, le procès-verbal du 28 juillet 1755 à Halifax affirme le contraire :

« The Deputies of Annapolis also appeared and refused the Oath..

Whereupon they were orderd into Confinement. As it had been before determined
to send all of the French inhabitants out of the Province  if they refused to Take
the Oaths, nothing now remained to be considered but what measures should
taken to send them away and where they should be sent to. »

Ce sont ces mesures-ci qui ont été décidées le 28 juillet 1755 et non la décision fatidique d’éventuellement déporter les Acadiens. Dire le contraire de ce qui est affirmé dans ledit procès-verbal camoufle le fait que ce soit non Lawrence et le Conseil de la Nouvelle-Écosse qui soient les premiers responsibles des actes génocidaires enves les Acadiens mais la Grande-Bretagne. Donc plusieurs se demandent quelle fut la justification du premier ministre Jean Chrétien pour exige une Proclamation royale « canadienne » en 2003 sauf si ce n’était que pour épargner la Couronne anglaise, pourtant seule coupable, et non le Canada. D’autant plus que cette Proclamation « canadienne » n’était, selon feu Jean-Marc Léger du Devoir (Montréal) « qu’une déclaration insignifiante et lénifiante qui comporte rien d’autre  que de constater un fait historique malheureux … sans la moindre allusion aux auteurs de la faute… « (11 décembe 2003). En juillet 2009, on lisait dans les journaux : « La Reine est heureuse de nommer le très honorable Jean Chrétien, l’ancien premier ministre du Canada, à titre de membre de « l’Ordre du mérite, selon  un communiqué émis par le bureau de presse de la couronne britannique» .

Pourtant on se demande que faisaient là aux côtés de Charles Lawrence, le 28 juillet, deux amiraux anglais Edward Boscawen et Savage Mostyn, en tant que représentants directs du gouvernement britannique. Selon une dépêche de Lawrence au gouverneur Ducourt de Louisbourg, datée le 13 juin 1755, on découvre quelque chose de fort intéressant : Nos capitaines de vaisseaux reçoivent toujours leurs instructions de la Cour et ces Messieurs ne sont nullement sous les ordres des gouverneurs des
Provinces ». (CEA Anselme-Chiasson, Université de Moncton, Fonds Placide-Gaudet I.13.19. )


Patrimoine canadien est coupable, pour reprendre quelques mots du Manifeste Beaubasin (25 octobre 2002) de tenter de « redéfinir l’histoire acadienne » dans le but de minimiser le rôle de la Grande-Bretagne auprès des nouvelles générations et de réécrire l’histoire en ridiculisant ceux qui osent dire la vérité. Il  est temps que l’élite acadienne, encore pour reprendre les mots du Maifeste Beaubasin, « se réapproprie son histoire  et que la mémoire des victimes de la Déportation (entre 7 500 et 9 000 morts) soit honorée dans la vérité. À ceux qui nous disent que Lawrence est « victime des études nationalistes» ou qu’il faut enfin « tourner la page », on peut leur dire avec le Manifeste Beaubassin qu’il est maintenant temps que le silence et le les mensonges sur le génocide acadien cessent… en commençant par Patrimoine canadien car la décision pour déporter éventuellement les Acadiens n’a pas ét prise le 28 juillet 1755.
Jamais rien n’a eu lieu pour justifier « tourner la page » à moins qu’on se laisse leurrer par ceux qui se réapproprient  notre histoire pour du nation-building ou pour duper les crédules pami nous avec de mensonges historiques ou demi-historiques. C’est ainsi que le peuple acadien sera relégué à un peuple qui a perdu son identité parce qu’il n’a pas enseigné toute  la vérité sur son histoire.

Au lieu de clamer que c’est le 28 juillet 1755 que la soi-disant décision initiale pour déporter les Acadiens a eu lieu, ne serait-il pas mieux comme pour un 11 Novembre, de se tourner vers la date du 13 décembre pour commémorer perpétuellement le sort mortel de nos ancêtres parce que ce jour-là  marque l’anniversaire de la noyade d’environ 362 Acadiens à bord du Duke William, étant le pire d’un convoi de trois naufrages totalisant plus de 850 noyés survenus en cinq jours en décembre 1758, naufrages qui ont coûté aux Acadiens plus de vies que n’importe quel autre événement du Grand Dérangement (1755-1762). La plupart de ceux-ci étaient des enfants car l’âge moyen était d’environ 15 ans. Au moins une commémoration en décembre, au lieu de la période du tourisme expérientiel, serait l’occasion idéale pour faire témoigner la vérité historque acadienne auprès de nos jeunes en période scolaire comme le font si ardemment les vétérans de guerre le 11 novembre et nos frères et nos soeurs amérindiens, au solstice estival.

David Le Gallant

auteur de Se souvenir de notre histoire 1755-2005

Mont-Carmel, Î.-P.-É.