Un client désirant une évaluation de la valeur marchande de ce très élégant vase de porcelaine serti de bronze m’a invité chez lui afin que j’examine l’objet en question.

Comme j’avais déjà vu le logo qui sert de signature de fabricant sous la pièce, ma recherche m’a mené directement au fabricant chinois, la United Wilson Porcelain (aucun lien de parenté).

Bien que ce vase semble sorti tout droit des grandes manufactures de Sèvres ou encore des fabriques de porcelaine d’Autriche, il s’agit ici d’une contrefaçon chinoise dans sa plus belle expression. En effet, cette compagnie dont le logo comporte la date de 1897 (sans justification) est une industrie très récente d’à peine quelques décennies, tout au plus.

Décor

Le but recherché par les porcelainiers de cette manufacture consistait bien sûr à créer des pièces qui ont du panache, qui créent un décor à elles seules. Leur impressionnante allure (et leur poids, il faut bien le dire) constitue une garantie de surprendre le visiteur dans un décor qui devrait absolument s’agencer avec cette pièce.

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Les couleurs (noir et orange), les angelots, mais surtout le blason comprenant trois croissants de lune indiquent certainement l’appartenance à une famille européenne, un lieu (peut-être en Afrique du Nord) ou tout simplement les marques officielles d’une importante compagnie.

Cette recherche pourra être complétée en entrant en contact avec les fabricants de cette imposante urne, puisque la compagnie est encore aujourd’hui en opération à Hong Kong.

Il ne s’agit donc pas d’une superbe antiquité dont la valeur marchande pourrait s’approcher d’un montant tournant autour des 10 000$. On peut facilement imaginer qu’une telle pièce, qu’on peut trouver dans les plus belles boutiques du quartier chinois de New York, se détaille autour des 700$ à 800$. Cette valeur marchande est imputable en grande partie aux coûts de transport que l’importation d’un tel objet nécessite.

Vous admettrez comme moi qu’une pièce de ce genre ne pourra faire bonne figure dans un décor québécois du dix-neuvième siècle, ni même d’un ensemble de meubles datant des années 60, ces belles grandes pièces élancées de teck scandinave.

Déception

J’ai bien sûr déçu mon client, lui qui rêvait de prendre l’avion et d’aller vendre cette urne aux enchères chez Sotheby’s. Les Chinois n’ont pas fini de nous surprendre, mais rappelez-vous simplement qu’ils connaissent le secret de la fabrication de la porcelaine depuis deux millénaires déjà, soit des centaines d’années avant que les Européens finissent par en percer les mystères.

C’est une des nombreuses raisons qui me fait apprécier la folle passion des amateurs de notre histoire, particulièrement celle de la céramique québécoise, pour qui les trouvailles du passé constituent un intérêt beaucoup plus intéressant que la production récente des pays importateurs.

Fierté

On a bien raison d’être fiers de nos ancêtres qui ont appris à force d’entêtement et de recherche artistique à peaufiner leur art pour nous laisser de superbes pièces qui, heureusement, constituent des investissements pour les générations qui nous suivront.

Et si je peux me permettre une confidence, je préfère et de loin, que mes clients me présentent des belles pièces nord-américaines plutôt que certaines productions qui ne m’emballent pas vraiment, qui sont beaucoup trop éloignées de ce qu’ont produit nos céramistes nord-américains.